• Chapitre III: L'exil

    Un jour, l’occasion se présenta enfin. Alors qu’Aergis fêtait sa 200ème opération, les apôtres semblaient en joie autour d’elle. Elle allait bientôt atteindre la dernière étape du Projet et les apôtres s’affairaient avec une motivation nouvelle. Bien que la guerre froide était finit depuis plusieurs années déjà, ils n’avaient pas abandonné ce projet fou, et voyait enfin le trophée à portée de leurs mains. Ce fût leur plus grande erreur de se réjouir de cet aboutissement.

    Alors qu’ils quittaient la salle d’opération pour la soirée, laissant Aergis vulgairement attaché au lit, l’un d’eux oublia de fermer la porte correctement, trop occupé à énumérer ses projets de fête. Elle le pressentit clairement grâce à son ouïe, c’était le moment rêvé. N’entendant plus aucun bruit dans l’enceinte du bâtiment, elle s’empressa de se contorsionner dans son lit d’opération, afin d’attraper un des scalpels laissés sur la table à côté. Après quelques minutes à se tortiller comme un ver, elle parvint enfin à attraper une des lames, qu’elle planta vivement dans le lien entourant son poignet gauche, se blessant par la même occasion. Faisant fît de la douleur qu’elle côtoyait quotidiennement, elle se libéra alors de son premier lien, puis s’attaqua aux trois autres, avec plus de délicatesse cette fois. Une fois libre de tout mouvement, elle se leva puis resta immobile quelques instants. Elle était toujours dans cette pièce, dans cette prison, mais elle sentait déjà la liberté enivrer ses poumons.

    - Encore un peu de temps Quinze. Laisse-moi encore un peu de temps et je vous retrouverai.

    Se disant, elle prit son élan et enfonça la porte qui n’en demanda pas plus pour s’ouvrir. Oubliant les caméras, elle traversa le couloir en un clin d’œil et s’empressa de dévaler les escaliers. Elle n’avait jamais parcouru la totalité du bâtiment mais elle avait pu se faire une idée claire de sa formation grâces aux informations que se donnaient les apôtres. Arrivée au rez-de-chaussée grâce à l’escalier de secours, elle entendit les pas de deux gardiens qui s’avançaient vers elle. Son cœur aurait pu s’affoler mais elle était prête. Elle attendit patiemment quelques secondes que ses futurs victimes se rapprochent avant de s’élancer vers eux. Ayant saisis l’extincteur près d’elle, elle assomma le gardien le plus près d’elle en traitre, et s’empressa de mettre à terre le second après lui avoir décoché une bonne droite. Son poing blessé par la force de la frappe se remit à neuf quelques secondes après. Puis, perdant son sang-froid un court instant, elle saisit le revolver que le premier gardien tentait de pointer vers elle en lui cassant le poignet et le remercia de ce présent d’une balle entre les deux yeux. Le deuxième s’étant déjà tourné pour s’enfuir, elle ne put que l’abattre d’une balle dans la nuque.
    Reprenant alors son souffle, elle laissa tomber l’arme du crime aux pieds de ses victimes et s’enfuie vers la porte de l’arrière court. Elle entendait déjà une alarme sonner les autres gardiens. C’était bientôt tout l’immeuble qui s’agitait.

    Elle eut alors l’idée de faire un saut dans la loge du surveillant, qui se chargeait de rendre les enregistrements des salles d’opération aux apôtres pour leurs études personnelles. Ouvrant la porte sans un bruit, elle l’étrangla par derrière sur son fauteuil. Par chance l’homme était aussi grand qu’elle, elle prit alors la peine de lui voler une partie de ses vêtements, sa blouse d’hôpital la contraignait dans une partie de ses mouvements. Avant de s’enfuir de nouveau, elle remarqua la présence d’un baladeur et son casque posé près du clavier de contrôle. Intriguée elle s’en empara, pensant découvrir son utilité lorsqu’elle serait dans un endroit plus sûr.

    S’approchant maintenant du hall de livraison, la jeune femme entendit les ordres de ce qui devait être le chef de garde.

    - Vous, retrouvez là ! Utilisez la force et les armes s’il faut, elle peut se régénérer, mais surtout pas dans la tête ! Je pense que les apôtres préfèrent milles fois la récupérer avec une cicatrice en plus que de la voir partir. Si on ne la retrouve pas nous sommes tous bon pour le goulag ! Hurlait-il.

    - Chef, dois-je avertir le Bien Aimée de la situation ? Nous ne parvenons pas à le contacter par téléphone ! s’exclama la voix d’un des gardiens.

    - Évidemment que vous le devez ! L’enceinte est fermée mais vous, empressez-vous d’aller prévenir le professeur ! Prenez le véhicule laissé dans l’arrière-cour. Assurez-vous que personne ne vous suive ! Ordonna le chef.

    - Bien Monsieur !

    Le véhicule situé dans l’arrière-cour Quatorze le voyait. Il était juste contre le mur derrière elle. Bingo !
    Avec une rapidité surnaturelle, Quatorze sortit de sa cachette et glissa sous les roues de la voiture. Elle entendait les pas du gardien envoyé en messager se rapprocher et s’empressa de s’agripper au-dessous de la voiture. Une fois en place, le gardien agitait alors déjà ses clés contre la portière et démarra à peine installé. Quatorze faillit lâcher prise sous l’effet du départ mais elle tint bon.  De sa cachette elle n’apercevait que les contours de la route de graviers qui séparait le bâtiment de la ville. Bientôt elle perçu un changement, la route se transformait en bitume et des bruits de plusieurs autres véhicules se mêlait à celui sous lequel elle était accrochée. Alors que le gardien traversait une ruelle étroite à sens unique, elle sentit que le moment de délaisser sa cachette était venu et lâcha prise. Sa chute sur les pavés fût assez douloureuse mais elle resta face contre terre quelques instants, le temps que la voiture se soit éloigné. Les bruits de la ville avaient recouvert celui de son atterrissage. Et comme la dernière fois, les blessures occasionnées se refermèrent aussitôt.

    Quatorze se releva alors, prenant à nouveau son souffle, respirant pour de bon cet air de liberté mêlé à celui de l’essence. Elle enfila la capuche de son sweat gentiment dérobé à sa dernière victime et commençait à marcher en direction de la rue adjacente à celle-ci quand soudain son regard rencontra celui d’un gamin posté devant elle. A voir ses yeux étonnés, il avait assisté à toute la scène.
    Ses derniers meurtres encore à l’esprit, elle ne sentit pas le cœur à parler à un jeune inconnu sans défense et lui tourna le dos sans rien dire. C’est alors qu’il l’interpella d’une voix tremblante:

    - Attends ! Co…Comment tu t’appelles ? demanda-t-il.

    Surprise, Quatorze se retourna et plongea ses yeux rouges dans ceux du gamin. Attendri par le regard qu’il lui renvoyait, elle se décida alors à répondre. Elle refusa cependant de dévoiler son numéro de cobaye et choisit le premier mot qui lui vint à l’esprit.

    - Mon prénom ? Je me nomme… Aergis. Répondit-elle avant de reprendre sa route, un sourire au coin des lèvres, enfilant son casque de musique sur les oreilles.

    Son évasion une fois réussie, Aergis découvrit un monde nouveau bien loin de celui qu’elle avait connu dans sa jeunesse avant d’être emmené secrètement dans le laboratoire du Conseil. Même si elle et les autres cobayes avaient souvent le droits à quelques sorties dans la cour du bâtiment, elle n’avait jamais fréquenté que ses camarades ainsi que les chercheurs et ce dans le plus grand silence. Tout ce nouveau bruit de la ville lui paraissait donc étrange. Elle mit du temps à s’y adapter à cause de ses sens surdéveloppés.

    Bientôt elle découvrit que la ville dans laquelle elle avait atterri se nommait Seryshevo. Cette ville se trouve non loin du pacifique et surtout du Japon. En s’adaptant rapidement, elle réussit à atteindre la côte avant de traverser clandestinement la mer du Japon. Ainsi commençait sa chasse pour retrouver le laboratoire de Kishimoto et ses camarades disparus.


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